" L'Ombre du vent " de Carlos Ruiz Zafon
« La coutume veut que la personne qui vient ici pour la première fois choisisse un livre, celui qu'elle préfère, et l'adopte, pour faire en sorte qu'il ne disparaisse jamais, qu'il reste
toujours vivant. C'est un serment très important. Pour la vie. Aujourd'hui, c'est ton tour.
Durant presque une demi-heure, je déambulais dans les mystères de ce labyrinthe qui sentait le vieux papier, la poussière et la magie.
Je laissais ma main frôler les rangées de reliures exposées, en essayant d'en choisir une.
J'hésitais parmi les titres à demi effacés par le temps, les mots dans des langues que je reconnaissais et des dizaines d'autres que j'étais incapable de cataloguer.
Je parcourus des corridors et des galeries en spirales, peuplés de milliers de volumes qui semblaient plus en savoir sur moi que je n'en savais sur eux. Bientôt l'idée s'empara de moi qu'un
univers infini à explorer s'ouvrait derrière chaque couverture tandis qu'au-delà de ces murs le monde laissait s'écouler la vie en après-midi de football et en feuilletons de radio, satisfait de
ne pas avoir à regarder beaucoup plus loin que son nombril.
Est-ce à cause de cette pensée, ou bien du hasard ou de son proche parent qui se pavane sous le nom de destin, toujours est-il que, tout d'un coup, je sus que j'avais choisi le livre que je
devais adopter.
Ou peut-être devrais-je dire le livre qui m'avait adopté.
Il se tenait timidement à l'extrémité d'un rayon, relié en cuir lie-de-vin, chuchotant son titre en caractères dorés qui luisaient à la lumière distillée du haut de la coupole.
Je m'approchai de lui et caressai les mots du bout des doigts, en lisant en silence:
L'Ombre du Vent
Julián
Carax »
Beau texte, non ?
TRES BEAU TEXTE.